samedi 6 novembre 2010

L'étrangère 9

Chapitre 9 : La maison blanche

Marina Skozy s'est toujours cachée. A toujours caché. Aux autres, à elle même surtout.
Se cacher, se taire.. Ici personne ne pourrait comprendre ça, d'ailleurs pense t-elle que pourraient-ils bien comprendre ces gens là.
Marina Skozy ne les comprend pas
Depuis son arrivée dans la nouvelle maison, elle est comme abasourdie, tétanisée par la lumière, les murs blancs, l'espace.
Une maison blanche, immaculée.
Cet espace qui se remplit avec les cartons, les piles de cartons que son mari apporte. Des cartons, des affaires, des meubles qui semblent de trop, incongru ici.
Cela fait mal, cela lui fait mal !
Marina Skozy aimerait que cette nouvelle maison reste vide, reste vierge, qu'il n'y ait rien, plus rien de cet ailleurs qu'elle n'arrivait pas à quitter pourtant
Marina Skozy voudrait que rien ne puisse altérer cette blancheur virginale, nul meuble, nul tableau, rien, du blanc tellement blanc qu’il en fait mal ! Il éblouit les yeux.
Blanc, propre, lisse, neuf…
Une nouvelle vie, elle aimerait être comme cette maison, neuve, sans histoire, sans passé.. Sans rien !

Elle regarde par la fenêtre et découvre le paysage, ce nouveau décor qui sera à présent le sien. Pour combien de temps ? Elle voit pas si loin, ces autres, qui la regarde eux aussi, qui l'épient
Elle déteste ça, alors elle les regarde, elle n’a pas envie de sourire, de leur dire bonjour, d’être aimable.
Qu’ils la destestent, cela la rassure presque ! Cette peur de ces autres là, est dans elle, au plus profond de son être
Marina Skozy se sent menacée par ces présences extérieures.. Ces regards, ces intrusions dans son espace à elle, dans son intimité..
C'est comme si elle se sentait pénétrée au plus profond d'elle même !

Elle s’est toujours sentie menacée, en danger, même si le danger n’existait pas, les autres sont des ennemis, ses ennemis, ils lui veulent dans le pire des cas, du mal, dans le meilleur être son ami. Et d’ami elle n’en n’a pas, elle n’en veut pas, un ami pense t-elle est pire qu’un ennemi, car d’un ami on ne se méfie, et c’est là, c’est là, à cet instant qu’il nous trahit
Trahison, car un ami trahit forcément ! Même si au départ il n’en n’a pas envie.
Marina Skozy est certaine qu’en réalité, son meilleur ennemi est son meilleur ami.
C’est pour elle une question de survie, d’en vie. C’est ce fil tenu qui la maintient en vie… Sur le fil de la vie.

Marina Skozy ne s’attache pas, ne veut pas de lien, pas de passé, pas de souvenirs,
Elle se dit qu’ici personne ne la cherchera, personne ne la trouvera
Elle regarde ces maisons, ces murs qui s’élèvent, ces gens qui passent, ces voitures au loin
Marina Skozy n’aime pas la vie, mais elle n’aime pas davantage la mort
Elle vit parce que c’est ainsi, sans en comprendre vraiment le sens, pourquoi est-elle en vie ?
Pourtant elle a toujours tout fait pour le rester, sans aimer ça,
Pff pense t-elle et passe à autre chose. Ces questions métaphysiques ne la passionnent pas, la vie est la vie, la mort c’est la fin, avant et après il n’y a rien et c’est tant mieux !

Peu à peu elle découvre le rythme, les habitudes de ces autres qu’elle fuit, elle remarque leurs rituels. Marina Skozy s’étonne et s’interroge, ce quartier si calme en apparence ne l’est pas tant que ça !
Des voitures circulent la nuit.. Pour aller où ? Pour faire quoi ? Il n’y a pas d’issue à ce quartier. Qui sont-elles ? Et où vont-elle. Cela l’intrigue, elle aimerait savoir. Par curiosité, distraction ?
Marina Skozy n’en sait rien, peut-être un peu de tout ça…
Elle ne dort pas, pas vraiment, elle dort et se réveille, plusieurs fois dans la nuit, elle se lève, va et vient, écoute les bruits de la nuit. Depuis tout ce temps elle les distingue, les identifie. Mais ici, il lui faut les apprivoiser, les reconnaître. Elle n’est pas habituée aux voitures qui roulent au pas, qui stationnent sans couper le moteur. Qui sont-elles ?

Le lendemain elle demande à son mari si il a remarqué ces allées et venues !
Tu as révé, des voitures ici, en pleine nuit ? Non ce n’est pas possible
Marina Skozy n’insiste pas, elle sait que c’est peine perdue et qu’elle n’aura une fois de plus pas raison. Jamais raison ! Et quelle raison ? Justement il n’y a pas de raison, aucune raison, elle n’aime pas la raison et le raisonnable…

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