mardi 19 octobre 2010

l'étrangère 7

Chapitre 7 : Une place ?

Marina Skozy a fait quelques cartons, elle s'est enfin décidée. Elle a enfin pu emballer ses affaires, ranger, jeter.
Des cartons cela fait des années qu'elle en fait, cela fait une vie. Certains n'ont même jamais été déballés depuis des années.

Au rythme des changements professionnels, au gré des maisons, des appartements, trop petits, trop grands, où il n'y a pas la place

Pas de place, c'est bien là toute la question, tout le problème de sa vie. La place, la sienne surtout, qu'elle ne trouve pas, qu'elle ne trouve plus
La place pour ses affaires ? Il n'y en aura pas dans cette nouvelle demeure
Deux meure...Meurt, mort et mort, que c'est mortifère se dit-elle avant de ne penser encore et encore que cette infâme demeure sera sa dernière
Elle en est effrayée.
Elle contemple les objets, les objets qui restent,
Ceux qui orneront ma pyramide rit-elle !

Son mari a déjà emmené des meubles, des affaires dont ils n'avaient plus besoin ici. C'est un travail considérable, titanesque, jamais elle n'est restée à un endroit aussi longtemps !

Il a vu la voisine. Celle ci, perfide, a profité qu'il soit seul pour engager un semblant de conversation

- "Que lui as tu dit" Questionne Marina Skozy

Elle ne décolère pas, quel bavard, mais quel bavard, se dit-elle, c'est plus fort que lui, il ne peut pas s'en empêcher il faut qu'il parle !
Mais quel besoin a t-il donc de raconter sa vie à cette vieille folle !

Car Marina Skozy en est certaine, cette femme est maléfique, toxique et méchante, elle a cette allure là, cela se lit sur son visage, dans ses yeux
C'est la première impression qu'elle donne et Marina Skozy sait qu'elle ne se trompe pas, les premières impressions qu'elle ressent sont toujours les bonnes, elle ne sait pas pourquoi, mais c'est comme ça ! C'est comme ça depuis toujours...
Cette femme est à fuir comme la peste, et encore la peste, on peut y échapper, c'est une faiseuse d'histoires comme on dit à la campagne, elle ferait battre des montagnes, dit-on encore...

Une expression qui la fait toujours sourire. Marina Skozy imagine les montagnes de son pays engager un terrible combat. Se rencontrer ? Amusant !

Elle est en colère contre son mari, qui croit toujours bien faire et fait n'importe quoi.

-"J'espère que tu n'as pas parlé de moi"
Eh si ! Il a parlé, raconté, parlé de la vie de Marina

C'est impardonnable, une fois de plus !
Marina Skozy ne veut pas qu'on parle d'elle, elle réclame, demande la transparence, qu'on ne la voit pas, qu'on ne l'imagine même pas. Elle ne veut pas faire partie du décor, du paysage, ce paysage là n'est pas le sien et elle n'a rien à y faire

"La Meltout sait tout !" mais sait quoi...
Car en réalité elle a surtout parlé d'elle, s'est posé en victime, une pauvre vie que la sienne.. La plaindre, la comprendre
Heureuse d'avoir des voisins !

Tu parles ! Heureuse d'avoir quelque chose à se mettre sous la dent, oui, sous l'oeil aussi

Parfois Marina Skozy se dit qu'elle exagère, qu'elle devrait faire un effort pour être un peu plus sociable, se faire des relations, rencontrer des gens !
Cela fait presque une dizaine d'années qu'elle est là, dans ce pays, dans cette région, dans cette ville qu'elle n'aime pas, et elle ne connait personne, ne parle à personne
Elle n'en ressent aucune souffrance, c'est un choix, son choix
A quoi bon rencontrer des gens, tisser des liens, pour partir, les quitter, abandonner tout, brusquement, comme ça !
Marina Skozy n'aime pas dire aurevoir, n'aime pas les adieux, alors elle a décidé de ne plus jamais avoir à en faire
Ne rencontrer personne, ne voir personne.
Les autres ne l'interressent pas, elle n'a gardé aucun lien avec des collègues de travail, d'ailleurs elle n'en n'avait aucun, ils n'ont jamais rien su d'elle ni de sa vie
Elle ne se raconte pas Marina Skozy, non qu'elle soit discrète, mais ne livre pas sa vie, ne se livre pas, personne ne sait qui elle est vraiment, et c'est sûrement mieux ainsi....
Une vieille habitude aussi, presque atavique. Soi, moi, qui suis-je vraiment ? Le sais-je ? Mais les autres, et cela est sûr, n'ont pas à le savoir.

Son mari a fixé une date, celle du départ, celle où ils passeront leur première nuit dans la nouvelle maison. Bien sûr tout ne sera pas déménagé complétement, mais ils y habiteront

Restent les nombreuses démarches, attestant de ce passage, de ce changement
La nouvelle adresse
Une nouvelle rue, un nouveau numéro de téléphone etc...
Marina Skozy aime bien ce moment, cette sorte de no man's land, où elle est nulle part, ni ici ni là, presque anonyme, elle se sent comme protégée, en sécurité, comme si personne ne pouvait la retrouver, la joindre
Elle se sent en sécurité, derrière ses nouveaux murs, blancs remparts contre les autres, ceux qu'elle fuit, dont elle se cache...

3 commentaires:

castor a dit…

Un blog et des textes interressants ! Je vous remercie pour vos passages sur mes espaces, et le lien sur votre blog.
Bien cordialement
Brigitte Dusch, castor :)

persona non gratta a dit…

Encore...

Les nouvelles d'Arsel a dit…

Merci à vous deux pour les encouragements, c'est sympa et ça donne envie de continuer :)))

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